Oui, s’attarder sur le vocabulaire, c’est prise de tête. Oui, la spiritualité, c’est avant tout de la pratique. Alors pourquoi se préoccuper de définitions ? Après tout, si je fais un jeûne, c’est un jeûne, non ? peu importe si c’est de la spiritualité, de la religion ou du développement personnel ? non ?
C’est vrai.
Tant que vous ne vivez pas (trop) d’expériences spirituelles, ça ne fera pas grande différence.
Dans le cas contraire, vous aurez besoin de mots pour les exprimer, les partager, les comprendre.
Sauf qu’à notre époque, les choses ont tendances à être confuses, voire mélangées (même si elles n’ont pas de frontières étanches) et, Internet n’aidant pas, finalement, on peut se faire lourdement avoir (et potentiellement perdre du temps, de l’argent ou de l’énergie).
Je vous raconte ça parce que moi-même, il m’a fallu du temps pour commencer à y voir plus clair. Je ne prétends pas avoir tout compris non plus. En tout cas, c’est là où j’en suis actuellement.
La méditation, qu’est-ce que c’est ?
Prenons un exemple banal de vocabulaire trompeur : la méditation. En occident, c’est souvent présenté comme une pratique contre le stress (du coup, on est dans le domaine du développement personnel), mais dans le yoga, on nous apprend que le but de la méditation, c’est d’atteindre le vide mental (la réduction du stress n’est qu’un sous produit) pour réaliser notre nature profonde (là, on entre dans la spiritualité) afin de « se libérer ». Se libérer de quoi ? de la « roue des ré-incarnations », et là, en fait, on est dans la « métaphysique » (ou presque, j’y reviens), parce qu’on bascule dans le surnaturel. D’un côté, la méditation est réduite à une pratique « de développement personnel », ce qu’elle n’est pas. De l’autre, on vous « refourgue » de la « métaphysique« , ce qui n’a rien à faire là non plus (vous n’allez pas vous souvenir de vos vies antérieures grâce au vide mental).
Évidement, je le redis, ces nuances n’ont de sens que si vous pratiquez et que soit vous vivez des choses, soit vous rencontrez des difficultés et donc vous allez vous tourner vers « quelqu’un » (une personne, une institution), et c’est à ce moment qu’il faut savoir où l’on met les pieds.
Des nuances importantes
Alors, allons-y. Voici les nuances qui me semblent importantes à comprendre. Ce ne sont que des propositions, tout cela peut bien sûr être discuté :
- Différence entre spiritualité et développement personnel : la spiritualité vise à dépasser le niveau « personnel », elle vise à aller dans le « trans-personnel ». Mais la spiritualité utilise le développement personnel comme base, car il faut être bien « ancré » en soi pour aller visiter la vastitude des phénomènes de la conscience. Ceci dit, la spiritualité va, par définition, au-delà de soi. Définir la spiritualité est notoirement quelque chose de difficile, mais le consensus (du moins dans la littérature scientifique) consiste à dire qu’il s’agit de se « relier à soi, aux autres, au monde ».
- Différence entre religion et spirituel ? elle se base sur le spirituel de toute évidence, mais rajoute un caractère sacré et collectif. Telle pierre sera sacrée pour les adeptes. Tel bout de forêt. Tel livre. Peu importe, c’est arbitraire (relativement), du moment que ça permet de fabriquer du sens, et je dirais même du sens collectif, puisque la religion, du latin « religare » signifie « relier ». On choisit donc un symbole qui relie une communauté, on en fait un totem, quelque chose de sacré. Cela permet notamment de donner un « cadre interprétatif » au vécu transpersonnel. Parce que quand vous vivez des expériences spirituelles, c’est difficile à exprimer. La religion va fournir un vocabulaire. La religion va se baser sur des mythes. En principe, la spiritualité est relativement agnostique.
- Différence entre religion et philosophie ? Les deux utilisent des mythes. Mais cette dernière va se distinguer de la religion en cela qu’elle adopte une approche naturaliste, c’est-à-dire, qui élimine le « surnaturel » et ainsi indirectement, le sacré. Du coup, la philosophie est plutôt individualiste alors que la religion est collectiviste. C’est dans la philosophie qu’on va parler de métaphysique : c’est une branche de la philosophe qui s’occupe de l’être. Ça semble un peu abstrait dit comme ça, mais il s’agit de savoir s’il existe des essences ou pas, s’il y a un monde plus réel qui existe, si le surnaturel existe ou non. La métaphysique peut s’occuper des questions de l’âme et de Dieu, mais pas à la manière des religieux qui en font des dogmes. Ce sont des concepts dont la pertinence et la définition sont discutées (dans un cadre naturaliste, Dieu devient simplement la cause première ou bien un principe universel).
- Différence entre philosophie et spiritualité ? À l’origine, la philosophie est vraiment très proche d’une forme sans dogme de spiritualité, une forme « laïque » on dirait de nos jours, où scientifique, si vous préférez. De nos jours, c’est devenu une pratique principalement spéculative. Elle n’est plus associée à des exercices ou des modes de vie particulière. Mais à l’origine, elle l’était.
En conclusion
De tout cela, que peut-on retenir ?
Il faut donc vous poser la question : est-ce que vous croyez au « surnaturel », ou non ? Est-ce que vous souhaitez faire partie d’un collectif ou non ? est-ce que la pratique est centrale pour vous ou non ? est-ce qu’il y a des choses sacrées pour vous ou non ?
Tout à l’heure, je disais qu’on vous refourgue de la « métaphysique » dans le yoga. En fait, j’aurais dû dire du « religieux » plutôt que « métaphysique » : croire dans la réincarnation (dans l’état actuel de nos connaissances scientifiques) c’est du surnaturel, donc du religieux. Mais le yoga n’est pas une religion : ce sont les pratiques spirituelles issues de la religion hindouiste. On est pile dans une zone de flou.
Les nuances que j’ai proposées ne résolvent pas toutes les situations, mais c’est une première approche et je pense que c’est déjà pas mal.
Vous avez une analyse différente ? Dite le, en commentaire.
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